Le livre de Chémoth – l’Exode – décrit les deux évènements majeurs de l’histoire d’Israël : la sortie d’Egypte et la Révélation de D. au mont Sinaï. Mais le texte sacré introduit ces deux évènements fondamentaux par la description de l’esclavage d’Israël et la terrible cruauté dont a usé le pharaon ; mais il y a aussi et surtout l’avènement de Moïse en tant que guide suprême d’Israël, depuis sa naissance entourée d’un halo de mystère.
En fait, ce livre relate ce que l’on pourrait appeler « la naissance d’Israël » en tant que peuple. Comme toute naissance humaine, le peuple d’Israël naîtra dans la douleur extrême, celle de la servitude en Egypte ; il en est des peuples comme des hommes. Nos sages nous font remarquer que la venue messianique, elle aussi, arrivera dans la douleur « comme celle de la parturiente », ce qui veut dire que la sortie d’Egypte préfigura la venue messianique, et les deux mégas évènements comportent bien des similitudes dans leur processus. Cependant, avant de parler de libération et de liberté, même chèrement acquise, il convient de comprendre l’histoire qui a précédé, celle de l’esclavage des fils d’Israël et des circonstances qui ont mené à cette période douloureuse. Mon propos n’est pas de comprendre pourquoi, car cela nous dépasse largement et ne relève que de la Volonté divine, mais d’analyser le processus de l’esclavage et celui de la libération.
D. avait prévu qu’Israël descendit en Egypte, de gré ou de force, même s’il dut être enchaîné disent nos sages, car l’Homme doit intégrer parfois la ligne droite de la Volonté de D. Imaginons une ligne droite, comme un axe en algèbre : c’est la Volonté de D. qui a un sens. Puis, dans le prolongement de cet axe horizontal, nous dessinons une ligne entrecoupée : c’est là que se situe la volonté de l’Homme. L’idéal serait que cette ligne discontinue soit pleine, afin de prolonger parfaitement l’axe de la Volonté divine. Mais D. en a voulu autrement et a interrompu Sa Volonté pour permettre à l’homme d’agir en lui recommandant de prolonger cette ligne droite. L’ennui est qu’il y a un décalage important entre la volonté humaine, grâce à son libre arbitre, et la Volonté de D. Cependant, il arrive que D. retire la liberté de choix à des hommes particulièrement importants à qui Il demande d’agir exactement comme Lui veut, pour réaliser Son dessein. D. pense les évènements et le monde de façon permanente et globale, en fonction de Son projet dans lequel Israël a une place centrale à occuper. S’il y a un décalage, à un moment donné crucial, entre la volonté d’Israël et celle de D. alors Il contraint le peuple d’Israël à agir exactement selon Sa Volonté, même sous la menace. C’est ainsi que l’on comprend le fameux enseignement de nos sages dans le Talmud, relatif au moment où D. devait Se révéler à Israël au Sinaï. Cela ne contredit pas fondamentalement le principe essentiel du libre arbitre dont D. a doté l’homme. L’esclavage voulu par D. fait partie de ces passages obligés auxquels Israël ne pouvait se soustraire, pour pouvoir poursuivre l’Histoire. Mais, disent nos sages, en même temps que D. prévoit le coup ou le malheur pour Israël, Il crée le remède qui permettra le subir cette période sans trop souffrir ; en même temps qu’Israël s’enfonce dans les ténèbres de l’exil d’Egypte et de l’esclavage, D. va faire jaillir l’étoile montante de Moïse, le libérateur d’Israël, le Messie pourrait-on dire.
Cette référence de la sortie d’Egypte, avec ses immenses implications, demeurera dans la Tradition d’Israël, notamment pour préfigurer ce que sera la venue messianique que nous attendons. C’est dans la souffrance et les malheurs que point la lumière de la liberté, de la délivrance. Nous y sommes certainement…